Gestion de Crise :« Combattre en dictature » (Jean-Luc Leleu),

Apprendre autrement, grâce à l’Histoire

Livre exceptionnel. Non seulement un recueil d’enseignements historiques mais aussi l’analyse passionnante d’une gestion de crise ratée côté ennemi (…et heureusement).  

Sur le plan historique, ce livre remet un certains nombre de pendules à l’heure. 

Il résonne aussi avec notre époque. Il permet de reconnaître des schémas propres aux dictatures et états totalitaires quant à leur traitement de la vérité. On peut y voir encore les limites du management par la peur ainsi que les vulnérabilités d’un système pyramidal avec son chef réputé infaillible. 

La lecture sociologique et psychologique approfondie d’un management de crise qui échoue permet de voir sous un autre angle les erreurs communes en situations de crise:

👉les croyances et les schémas mentaux qui préparent la défaite:
La conviction que les Alliés ne pouvaient pas agir autrement que ce qui était prévu dans les “kriegspiels” confirme que les équipes de Red Team nécessitent des individus non conformistes, capables de penser autrement afin d’envisager l’improbable. 
Les troupes allemandes vont ainsi penser que le débarquement ne peut avoir lieu ce jour là en raison de la météo. Elles vont s’enfermer dans une rigidité mentale, convaincues que le débarquement en Normandie est une diversion, se privant ainsi de renforts décisifs,

👉le flux d’informations qui submerge:
Bien qu’un débarquement était effectivement attendu en Normandie, les état-major allemands ont été submergés par le flots d’informations souvent contradictoires. L’impossibilité d’en déterminer une ligne générale a enfermé les décideurs dans un état de saturation informationnelle les sidérant, les paralysant peu à peu dans le désarroi, 

👉la perte prolongée de l’initiative et l’attentisme en mode “désert des Tartares” ont quasiment fait percevoir le débarquement allié comme une “libération” par les troupes qui attendaient ce combat dans une routine usante (de fausses alertes) où l’entraînement n’avait plus de place,

👉une organisation du commandement et des responsabilités devenue bureaucratique et floue pour ménager les égos et les prés carrés. 
Conséquence: outre le conformisme, l’incapacité à sortir des plans prédéfinis, la difficulté à prendre des initiatives avec des informations parcellaires, la perte d’une vision d’ensemble et de l’objectif commun,

👉le timing de la décision: “avant c’est trop tôt, après c’est trop tard… “. “Comment comprendre qu’une décision, logique à l’instant où elle est prise d’après les informations disponibles, puisse en fin de compte se révéler contre-productive et aggraver la situation initiale ?”. Ainsi des troupes en réserves vont faire inutilement l’essuie-glace à quelques kilomètre du front.

👉enfin, les Alliés ont eu la chance bien connue de ceux qui la prennent !